EXTRAIT D'UN ENTRETIEN AVEC CAROLINE FILLIETTE / MAGAZINE PERSONA 2024
Les personnages de tes tableaux
semblent souvent inquiets, hébétés,
effrayés, parfois étrangement béats
et souriants. Mais on ne sait jamais
pour quelles raisons, ni d’où viendrait
le danger potentiel en hors-champs.
On pense aux ambiances des films de
David Lynch ou Hitchcock. As-tu des
histoires précises en tête ?
J’essaie de ne pas rester sur une façade
mais de montrer quelque chose de plus
profond dans le regard, l’attitude et ’essaie de faire ressortir l’ambiguïté.
J’aime bien ne pas savoir ce que ressent
le personnage que je peins, s’il est
joyeux, triste, ou un mélange des deux.
Il peut y avoir une histoire, mais à
l’arrivée ce ne sera pas forcément la
même qu’au départ. J’ai une très grande
admiration pour le cinéma de genre et
particulièrement pour Brian De Palma
avec, en tête Phantom of the Paradise
qui a eu une résonance particulière
pour moi.
Dans la série Diplomates, on retrouve
des têtes connues (Elvis Presley, Kirk
Douglas, Dean Martin). Ces tableaux
sont burlesques et angoissants.
Cette série représente vraiment
l’ambiguïté de l’être humain. Il y a des
jeux de regards entre les personnages,
j’essaie de mettre en avant quelque chose
de pas clair dans leurs rapports, de l’ordre
de la moquerie. J’aime aussi le côté
pantin, marionnette, manipulation : c’est
un reflet de l’humanité qui me fascine
complètement. Je souhaitais peindre une
scène avec des personnages qui peuvent
être mal à l’aise et que le spectateur ne
sache pas trop qui s’amuse réellement ou
non, qui est le dindon de la farce.